Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Les facéties de Lucie
Archives
7 mai 2013

Le bruit des clefs d'Anne Goscinny

bruit des clefs 

La collection Les affranchis des éditions du Nil lance un défi à ses auteurs : "Ecrivez la lettre que vous n'avez jamais écrite" 

"Quand tout a été dit sans qu'il soit possible de tourner la page, écrire à l'autre devient la seule issue. Mais passer à l'acte est risqué. Ainsi, après avoir rédigé sa lettre au père Kafka avait préféré la ranger dans un tiroir. Ecrire une lettre, une seule, c'est s'offrir le point final, s'affranchir d'une vieille histoire.

Le bruit des clefs est la lettre d'Anne Goscinny à son père disparu.

Elle a 9 ans quand son père succombe à un test d'effort. A partir de ce moment là, un seul trousseau de clefs est jeté sur le meuble de l'entrée. Celui de sa mère qui lutte contre un cancer. Ce bruit des clefs semble "anodin", il va pourtant "guillotiner" l'enfance d'Anne Goscinny.

Ce récit est la lettre qu'elle adresse à ce père parti trop tôt. Elle y déroule le tapis des souvenirs sans chronologie, sans fards et sans romance.

C'est une plongée au coeur de l'intime avec pudeur et délicatesse.

Elle dit la difficulté de se contruire sans toutes ses racines, d'avancer dans la vie sans parents spectateurs de nos premières fois, de faire le deuil sans le refuge de la croyance certaine d'un au-delà.

Quand on perd un parent, on se bricole une solution pour continuer quand même.

D'abord on veut se vêtir comme le disparu, retrouver sa voix, son parfum, son image. C'est le "culte des restes"

Comme cela ne fonctionne pas, on veut ensuite l'enterrer encore plus profond qu'il n'est déjà, l'annuler. Mais c'est difficile quand le père est célébre et que ses mots embullés sont lus par toutes et tous, que sa voix et son image sont de toutes les rétrospectives. 

Alors il ne reste plus qu'à l'inventer, le chercher dans les livres ou dans tous les hommes de sa vie en pratiquant l'art du transfert.

Jusqu'au jour où l'on peut voir les traits du père dans ceux de ses propres enfants. On a fini par avancer en faisant le deuil de la femme que l'on serait devenue si ce père était encore en vie.

Magnifique confession qui parlera à tout les orphelins de père ou de mère et touchera ceux qui ont encore toutes leurs racines. 

Extraits :

"Etre orpheline d'un père si célèbre donne lieu à des situations où se mêlent chagrin et fierté."

"Le cancer aide les petites filles rebelles à la réalité à la regarder en face"

"Je ne suis pas certaine de croire à tout ce qu'on dit aux endeuillés pour les réconforter". 

"La prière quand elle se montre n'est déjà plus une prière. C'est une mise en scène de prière. Si je priais, je prierais en marchant dans la rue, en jouant avec mes enfants, en attendant mon tour dans une file. Je prierais les yeux ouverts, les mains libbres de serrer celles des gens que j'aime."

"Dévasté sans éclat. Démoli sans tapage. Pas de sanglots, pas de douleur bruyante. le désespoir sec. Le vrai. celui qui impressionne."

Publicité
Commentaires
L
J'ai beaucoup pleuré mais quelle lettre ! Merci Lucie.
Répondre
L
@antigone : ça vaut le coup...je te l'envoie ?
Répondre
A
Après avoir lu "l'autre fille" d'annie ernaux dans cette même collection, je pensais continuer... il faudrait.
Répondre
S
Une très jolie collection. Je note celui-ci.
Répondre
C
cette collection est sublime !
Répondre
Les facéties de Lucie
Publicité
Derniers commentaires
Publicité