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Les facéties de Lucie
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25 août 2011

"C'est un drôle de truc l'attachement, ça pousse à faire toutes sortes de choses folles qu'on ne devrait pas."

Joyce Maynard verse souvent dans l'auto fiction lorsqu'elle écrit. Dans ce roman elle se raconte carrément pour se comprendre et s'expliquer. Elle relate notamment un épisode qui a façonné le reste de sa vie : sa rencontre avec J.D Salinger l'auteur de « l'attrape coeur »

Un papa professeur de littérature et alcoolique, une maman intrusive qui reporte ses rêves sur ses filles, une soeur à qui tout réussi, voici la composition du cocon familial dans lequel Joyce Maynard a besoin de se réfugier lorsqu'elle veut écrire.

Elle vit sa vie sur le papier et, suivant le chemin tracé par sa mère dont les talents de conteuse rendent passionnanr un événement banal, elle écrit dans le New York Times des chroniques sur la vie d'ado puis de femme et de mère lorsqu'elle le deviendra. Elle rêve de gloire, de succès. De sa relation fusionnelle avec sa mère, elle hérite troubles du comportement alimentaire et blocages sexuels.

Ses premières chroniques lui valent de recevoir de nombreux courriers de lecteurs enthousiastes. Parmi eux, un certain J.D. Salinger qui l'exhortera à ne pas se laisser corrompre par le système, à ne pas se laisser dicter quoi que ce soit, à ne pas perdre son temps en autopromotion de ses écrits. Les échanges de courrier entre eux se font de plus en plus nombreux, puis ils se téléphonent et enfin Joyce va carrément passer un week end avec cet écrivain de 35 ans son aîné pour finir par abandonner ses études et s'installer avec lui.

Il devient son sauveur, celui qui la comprend enfin. Elle boit ses paroles et adopte son mode de vie new age se nourrissant de graines de courge et de viande cuite à 150°c, méditant et se soignant par les plantes. Complètement addict à l'homme, elle ne se voit pas devenir marionnette entre ses mains. Il la coupe de sa famille, de son éditeur et la fait renoncer au matérialisme qu'il abhorre. D'encourageant et admiratif, Salinger devient cassant jusqu'à ce qu'il quitte Joyce du jour au lendemain. Comment se relever d'une telle rupture lorsque l'on s'en remettait à cet homme pour tout ? Que faire de sa vie ?

Elle tente cahin caha de refaire sa vie mais l'ombre de Salinger plane...

C'est le récit d'une passion destructrice qui laisse comme groggy lorsqu'on est abandonné par l'homme à qui l'on a pourtant tenté de plaire par tous les moyens y compris en oubliant qui nous sommes vraiment. L'entreprise de reconstruction est alors gigantesque : retrouver l'estime de soi et la dignité, se libérer de la culpabilité, et s'autoriser le bonheur. Si elle avait publié cet épisode sous forme de chroniques dans une revue, nombreuses seraient les femmes qui ont été sous la coupe d'un manipulateur et dans une réelle dépendance affective à écrire à Joyce Maynard pour la remercier de dire tout haut ce qu'elles taisent.

Ce roman ne sent pas le règlement de compte, il n'est pas un plaidoyer anti Salinger. Il est le récit d'une femme qui a souffert et qui souhaite grandir enfin, se libérer du passé et cesser d'accomplir les choses pour plaire à ses parents ou à un homme. Il n'est pas seulement un récit intime mais un témoignage sur des thèmes qui nous touchent toutes à différents degrés :alcoolisme, anorexie, maternité, relations homme/femme, parents/enfants. Un récit qui fait écho chez beaucoup d'entre nous..

Clara n'est pas ressortie bouleversée par ce récit, Gwen trouve que ce témoignage donne à réfléchir et Cynthia a été tour à tour touchée et révoltée par cette histoire qu'elle a aimé. 

Lu dans le cadre du prix des lectrices de Elle 2012. Catégorie Document.

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Commentaires
L
@gwen : oui, c'est celui que j'ai préféré dans la catégorie document pour le moment...
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G
C'est un livre qui m'a marquée. Je suis contente que tu l'aies apprécié...
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L
@cynthia : oui un roman qui marque...
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C
Merci pour le lien Lucie ;) Moi non plus je ne savais pas qu'il était sélectionné pour le prix Elle. Mais je suis ravie de l'apprendre car c'est un livre auquel je repense encore, même des mois après sa lecture.<br /> Non seulement cette femme a su se libérer de ses fantômes mais elle l'a fait avec classe et sobriété, sans verser dans le ton revanchard (elle aurait pourtant eu de bonnes raisons!).
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L
@clara : et si ! j'ai beaucoup aimé !<br /> @orchidée : oui j'avais vu, faut que je le lise
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